MAUX contre MOTS

85 Nous n’aurions jamais dû prendre cette histoire à la légère, nous n’au- rions jamais dû partir à la croix, cette nuit-là… Il était minuit, mes cousins Erell et Antoine, mon frère Moana et moi mar- chions en direction de la croix. Nous allions, là-bas, pour prouver aux en- fants du village que cette légende de croix maudite, ce mémorial 39-45, c’était du délire. Une fois arrivés, nous regrettions déjà d’être venus : le vent soufflait, l’orage grondait, derrière nous, une immense forêt sombre et lugubre. Nous nous sommes approchés de la croix et, tout à coup, à l’instant même où Erell l’a touchée, nous avons tous eu des spasmes et nous nous sommes évanouis… Quand j’ouvris les yeux, il faisait toujours nuit, je sentais la pluie tomber sur moi, le vent soufflait encore. J’ai tourné la tête, les autres n’étaient pas réveillés. Puis, je me suis souvenue pourquoi nous étions tous par terre… Ce qui s’était passé relevait de l’impossible. Comment quatre personnes auraient pu s’évanouir au même instant… Avais-je rêvé ? Soudain la pluie s’intensifia et une seule idée me vint à l’esprit : réveiller les autres et re- tourner chez nous car la situation n’avait plus rien de drôle. Je les ai donc réveillés et nous sommes partis. Alors que nous courions sur le sentier, nous avons entendu un coup de feu : nous avons pilé net, que se passait-il ? À cet instant, je réalisais une chose que j’aurai dû remarquer bien avant : la boulangerie avait disparu, il n’y avait aucune lumière, le village avait changé… Nous n’avions qu’une chose à faire : courir jusqu’à la maison et faire comme si rien de tout ça n’était arrivé. LA CROI MAUDITE COLLÈGE DE TARAVAO X