Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire
l’authenticité. Les Maoris ( Mäori ) de Nouvelle-Zélande se désignaient autre- fois comme tangata whenua (humain - de la/du - terre/pays) mais à partir du contact avec les Blancs, et très exactement des années 1810-1812, ils choisirent de se nommer Mäori (indigènes, de l’intérieur), par rapport aux nouveaux venus dits Pakeha 6 . La racine commune aux termes ma’oli, ma’oki, ma’oni, mäori , celle qui leur donne un sens (celui de la fixité, voire de l’enracinement) est bien ’oki (’oni, ’oli, ’ohi …) et non mä . Le mä de mä’ohi , en langue tahitienne, n’est d’ailleurs qu’un préfixe (comme tä ou pä ) d’accompagnement. Dans mä’ohi , il accom- pagne l’idée d’ancrage découlant de la racine protopolynésienne ’oki , de même que dans mä’ute’ute (rougeâtre), ou mä’ere’ere (noirâtre), il accompagne l’idée de couleur ( ’ute’ute , rouge ; ’ere’ere , noir). Le sens de mä’ohi ne provient donc pas de l’addition du sens de deux parties ( mä et ’ohi ) qui apparemment le composent, mais bien de cette racine ’oki . D’ailleurs, la petite pousse ( ohi ) chère au théologien nationaliste Duro Raapoto ne porte pas de glottale, tandis que mä’ohi s’écrit mä + ’ohi , mais quoi qu’il en soit, le problème n’est pas là, car répétons-le, mä’ohi forme un tout, ne se découpe pas sémantiquement. Aussi l’étymologie mä’ohi = mä (propre/libre) + ohi (pousse) relève-t-elle de la poésie et surtout de la valorisation identitaire mais pas de la linguistique. La généralisation extrême de l’emploi du terme mä’ohi depuis la fin des années 1970, et la glorification dont il fait l’objet, ont étonné voire irrité certains Tahitiens qui y perçoivent une dérive totalement idéologique. S’est même créée en 2006 une association, Hiti Roa dont le but est de pourfendre l’utilisation dénoncée comme abusive du terme mä’ohi 7 . Ses fondateurs sont des Tahitiens d’un certain âge, dont l’ancien maire de Papara, Eugène Bessert. Ils ont choisi pour nom Hiti Roa en référence à Hiti nui, l’ancien nom de Tahiti ( roa et nui étant des syno- nymes signifiant la grandeur, la longueur, l’étendue). Le nom Hiti, qui désigne le levant, mais aussi une bordure, une frontière, entrait autrefois dans la composition de certains noms d’îles ou d’archipels de l’actuelle Polynésie française. D’après Teuira Henry (1975 : 75) “Tahiti et Mo’orea 189 6 Communication personnelle, Dame Anne Salmond, Professeur d’Études maories à l’Université d’Auckland, 06/03/2009. 7 Elle sort de l’ombre l’année suivante, au moyen d’une conférence de presse, avec banderoles, tricots à son nom, etc. Cette manifestation se tient le 07/07/2007, un jour choisi symboliquement pour manifester la vérité (on le voit, la culture judéo-chrétienne continue d’éclairer les représentations tahitiennes dans toutes sortes de domaines).Voir La Dépêche de Tahiti, 09-07-2007, p. 21.
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