Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

Diverses préparations dénommées po’e étaient également utilisées, mélangeant des tubercules râpés et des fruits avec du lait de coco et le tout cuit au four. Les modes de préparation variaient donc à partir d’un nombre pourtant restreint d’ingrédients de base. Hormis des cas de consommation crue de produits marins macérés dans un mélange d’eau de mer et de lait de coco, les Polynésiens préparaient par diffé- rents modes de cuisson toute leur nourriture, la grande majorité des aliments de base devant être cuite pour être consommée. La cuisson par exposition directe au feu et aux braises constituait une des méthodes de cuisson les plus utilisées par les Tahitiens, avec la cuisson au four enterré. En revanche, peu ou pas de préparation bouillie n’est relevée faute de récipients tenant au feu vif. La cuisson à l’étouffée avec le four enterré, le umu ou ahima’a , était au centre des repas collectifs, quotidiens et familiaux ou festifs et cérémoniels. La tech- nique serait très ancienne, générale dans la zone Pacifique intertropicale, et sous une forme plus rudimentaire enAfrique et enAmérique équatoriales, mais la préparation de festins sacrés à partir de fours souterrains était spécifiquement polynésienne. Des distinctions étaient établies selon plusieurs critères : en fonc- tion de la destination (type d’aliment cuit), du nombre de convives (membres d’une maisonnée, rassemblement collectif…), et de l’usage (profane ou sacré). Le four à ’uru constituait un des types de four polynésien. À l’occasion de la récolte des fruits de l’arbre à pain, des fours collectifs à ’uru étaient préparés, pouvant contenir jusqu’à plus d’une tonne de fruits. Issu de cette préparation, le opi’o avait le mérite de permettre une conservation un peu plus longue du ’uru . La mise en œuvre d’un four collectif à ’uru constituait l’occasion de festins, qui pouvaient durer plusieurs semaines. La majeure partie de l’alimentation au quotidien était à base de vivriers locaux, dénommés ma’a , du nom générique qui désigne aujourd’hui la nourriture. Le « repas » type était ainsi composé d’un végétal de base ( ma’a ), d’un morceau de viande ou de poisson plus souvent ( ina’i ), une sauce ( miti ), triade typique de l’alimentation polynésienne. Viande, et produits marins surtout, ne constituaient que l’accompagnement des végétaux. Les aliments consommés dépendaient bien évidemment des saisons et des périodes de fructification, mais d’une façon générale, au quotidien, la viande des animaux terrestres était très peu consommée. Le quotidien alimentaire tahitien était celui de l’uniformité et de l’isolement relatif. C’était le temps de l’irrégularité, les aliments étant fournis selon la disponibilité, de la frugalité au moins qualitative. Le festif ( ’oro’a ) était le temps du regroupement communautaire, du « manger 199

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