16 2.3 La danse, un divertissement du peuple polynésien Danseuses à Tahiti – Gravure tirée de l’Atlas de Cook (1777) d’après un dessin de J. Webber - Source : Encyclopédie de Tahiti n°5 2.3.1 ’Ori tahiti21 Dans la société polynésienne d’autrefois, le ’ori ou la danse s’inscrivait principalement dans les fêtes appelées heiva qui réunissaient une variété de divertissements. Les polynésiens dansaient pour honorer la venue des invités de marques, d’autres chefs. Elle faisait partie des rituels organisés à l’occasion d’un mariage, d’un décès, d’un départ en voyage….C’était aussi un moyen de réconcilier deux familles ou deux clans. A l’opposée, la danse trouvait aussi son inspiration dans la guerre à l’occasion de certaines festivités pour célébrer une victoire ou louer les exploits d’un guerrier. Elle avait aussi une place importante dans les cérémonies religieuses. Les danses interprétées étaient une invocation aux dieux lors de la saison des récoltes ou des rites agricoles. Les ’arioi, disciples du dieu ’Oro offraient régulièrement des spectacles nocturnes pour lui rendre hommage. Mais cette confrérie disparaît peu de temps avant la conversion au protestantisme. Lorsque les premiers missionnaires protestant débarquent à Tahiti le 5 mars 1797, ils qualifient la danse comme un divertissement immoral, obscène et tentent très tôt de l’interdire. A partir de 1815, quand les tahitiens commencent à se convertir au christianisme, les missionnaires s’empressent d’abolir cette expression qu’ils ne comprennent pas en imposant des codes de lois qui suscitent de vives réactions au sein de la population. En 1820, on assiste ainsi aux premières ruptures ecclésiastiques avec les Tūtae ’āuri puis les Māmāiā. En 1842, l’arrivée des Français modifie très peu la situation. Ils constatent que certains continuent la pratique de la danse au fond des vallées. Ils autorisent alors les tahitiens à « se livrer avec modération et décence aux danses du pays ». Le compromis échoue et de nouvelles restrictions sont mises en place en 1847. En 1849, la reine Pomare établit une nouvelle loi qui vise à censurer toutes les activités qui risquent de troubler l’ordre public. Le 29 juin 1880, la Polynésie est cédée à la France et l’administration coloniale décide alors d’installer la fête nationale à Tahiti. Le 14 juillet 1881, les premières festivités sont mises en place. Les Polynésiens, y sont conviés. Ces manifestations, baptisés tiurai (terme dérivé de l’anglais july), voient le jour du premier concours de chants traditionnels. Quant aux danses traditionnelles, elles s’affaiblissent mais ne disparaissent pas totalement. Au fil des années, la célébration de la fête nationale s’ancre dans les mœurs et offre un terrain propice aux festivités. En 1895, la danse retrouve progressivement ses droits. Il faudra attendre 1856, grâce à Madeleine Moua, pour que le ’ori tahiti soit réhabilité et remis à l’honneur. Le développement du tourisme encourage les manifestations : les costumes et les chorégraphies sont alors travaillés pour les prestations. Depuis, de nombreux groupes commencent à voir le jour, les premiers concours se déroulent sur la place Tarahoi. En 1984, l’autonomie interne est instaurée, le tiurai devient heiva, renouant ainsi avec son appellation d’origine. 21 Marion Fayn, ’Ori tahiti, la danse à Tahiti, collection Survol, Aux vent des îles, 2007
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